Médicaments Génériques
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Ces fabricants de génériques
qui soignent les pharmaciens

Censés combler le trou de la Sécu, ces médicaments à prix réduit mettent du baume au coeur des potards

COCORICO ! En 2006, le trou de la Sécu serait moins abyssal que l'année précédente. «Seulement »  8,7 milliards : un de moins que prévu. C'est Xavier Bertrand, ministre de la Santé et porte­parole de Sarko, qui l'a claironné le 18 mars. Sauf qu'à ausculter la Sécu au plus près on s'aperçoit que, malgré l'économie de 400 millions d'euros réalisée grâce aux génériques, le « plan médicament » en cours n'a pas permis de bien soigner la malade. Mais les labos pharmaceutiques, eux, continuent à péter la santé. L'allemand Merck génériques, notamment (plus d'un quart du marché à lui seul), se porte comme un charme: 450 millions d'euros de chiffre d'affaires, soit une progression de 21 % en un an. Un vrai petit miracle dans un secteur ultraconcurrentiel où tout le monde se dispute les mêmes mo­lécules tombées dans le domaine pu­blic. Pour inciter les apothicaires à vendre ces médicaments censés com­bler le gouffre de la Sécu, l'Etat a gentiment mis en place un système de remises, hélas limitées à 20 %. Et multipliés si le pharmacien en commande quatre de plus. La mise sur le marché, en juin 2006, de la Pravastatine - une molécule anticholestérol - permettait ainsi de décrocher de 100 à 500 euros de chèques-cadeaux, sous forme de bons d'achat dans les grandes enseignes, à partir de 100 boîtes vendues. Et plus si affinités.

Magique potion

Parmi les innombrables pharma­ciens sensibles à ces arguments son­nants et trébuchants, on cite le cas de cette officine de Nanterre qui s'est embourbé 1 200 euros de bons d'achat. A Saint-Laurent-du-Var ou à Nice, certains apothicaires en ont encaissé 1500. Au Luc (Var), un bon élève a décroché la timbale : 3 000 euros ! Beaucoup plus efficace qu'une ordonnance de fortifiants. Et pas be­soin d'avoir fait HEC pour com­prendre quel est l'intérêt du labo: plus sa gamme de médicaments est large, plus il a une chance de devenir l'interlocuteur quasi unique du pharmacien, soucieux de se simplifier la vie au moment de sa commande.

 

Un peu agacé par cette conception de la concurrence, le syndicat qui re­groupe tous les fabricants de géné­riques, le Gemme, a réuni son co­mité d'alerte. Dans une lettre adressée le 12 avril 2006 à ses adhérents, il rappelait au passage que « les avantages en nature sont interdits par la loi ». Puis se risquait à de fines allusions aux « quelques laboratoires qui abusent de cette pratique illégale afin de rendre leur offre commerciale plus attractive aux yeux des pharmaciens ». Le syndicat allait même jusqu'à menacer les dirigeants des labos concernés de «sanctions pénales ». Il faut dire qu'un autre fabricant, petit celui-là, Bouchara-Reccordati, a poussé le bouchon un peu loin en distribuant lecteurs DVD, appareils photo ou Caméscope numériques. Merck, vexé de ce petit cours d'éthique, a claqué la porte du syndicat.

  Potards mouillés  

Faute de dialogue interne, le 6 juin 2006 partait à la Direction générale de la concurrence et de la répression des fraudes un courrier du Gemme  

évoquant cette procédure interne d'alerte « vis-à-vis de deux labora­toires dont les pratiques commer­ciales particulières (sic) ont été confirmées ». Précisant qu'il tenait à la disposition de l'administration les informations sur « la mise en place d'une politique systématique de chèques-cadeaux (les paliers allant de 1000 à 5000 euros) », Philippe Ranty, le patron du Gemme, remercié depuis, demandait à la Direction de la concurrence de « diligenter des actions ». C'était il y a dix mois. Depuis, rien. A quelques semaines des élections, pourquoi embêter de dynamiques entrepreneurs et une corporation aussi sympathique que les pharmaciens ? D'autant que le labo incriminé a tout prévu: pas question d'arroser directement les pharmaciens en titre. La loi anti-cadeaux de mars 2002 l'interdit formellement pour les professionnels de santé. Leurs collaborateurs, en revanche, ne sont pas concernés. C'est un salarié qui réceptionne le petit cadeau.
Mais la mesure s'appliquant à tous, quel remède de cheval s'est donc administré Merck génériques pour faire ainsi la course en tête ?  

Réponse : la direction du labo teuton a bien compris que rien ne va­lait un peu de tendresse dans ce monde de brutes. Elle a donc élaboré une politique de petits chèques-cadeaux, destinés à entretenir l'amitié. Exemple, le barème appliqué par les commerciaux de la maison en 2006: pour un chiffre d'affaires de 15 000 euros, le bonus était de 100 euros; pour un chiffre d'affaires de 50000 euros, il montait jusqu'à 400. Mais attention! chez Merck, tout se mérite. Ces petits plus sont subor­donnés à l'achat d'au moins deux nouveautés conçues à partir des molécules qui ne sont plus protégées par un brevet.

A charge pour lui de partager avec son patron. Lequel ignore, la plupart du temps, qu'il tombe alors sous le coup de la législation sur les avantages en nature que l'employeur doit déclarer à l'Urssaf.

Interrogé par « Le Canard », après un couplet sur tous ces jaloux que le succès rend méchants, l'un des directeurs de Merck a botté en touche: « Pour des raisons de confidentialité évidentes vis-à-vis de nos concurrents, je ne dévoilerai pas nos pratiques commerciales. Mais celles-ci répondent strictement à la structure légale en vigueur. » Alors, la prochaine fois qu'un apo­thicaire, tout miel, vous propose : « Puis-je vous donner le générique?", demandez-lui, tout aussi aimable­ment, le montant de son chèque­cadeau. Effet garanti.

Brigitte Rossigneux

 

Scan de l'article du Canard Enchaîné du 21 mars 2007 (836 Ko format *.tif)

 


Ce n'est pas exactement un médicament générique...
Le fabricant préfère juste rester anonyme.

 

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